Baby blues (Daisy)

Je n’avais pas trop l’aisance, ni l’élégance, des patineurs c’est pourquoi j’avais préféré venir m’installer en retrait. Il faut dire que la soirée promettait et je comptais bien profiter de l’occasion pour me foutre de la gueule des gens qui allaient se casser la figure en chutant lourdement contre la patinoire. Bien que je ne fusse pas en fonction je n’en perdais pas moins mes réflexes de flics et je n’étais pas sans avoir remarqué la présence de ces quelques gamins qui, de toute évidence, semblait tramer un petit quelque chose de pas catholique. Les petites frappes ça me connaissait et j’avais ces lascars dans le collimateur. Ma dégaine tranchait avec celle des gens, alors que la plupart semblait avoir enfilé leurs plus jolis atours, j’étais vêtu d’un jeans et d’une chemise tout en portant ma veste de cuir noir. Mon look puait le flic à plein nez mais n’étant pas en service je ne disposais pas de mon flingue, je me sentais totalement démuni.

M’étant approché je vis que le leader de cette horde jeune homme semblait vouloir foutre la merde et bien que je mourrais d’envie de lui faire boire de la soupe aux dents j’avais fini par prendre sur moi après tout je n’allais tout de même pas commencer à brutaliser des gamins. Une jeune femme, fort jolie, arriva en direction du banc où se trouvaient les gamins et de toute évidence ils n’avaient pas eu la décence de libérer le siège au profit de la jeune femme au ventre rond. Ce manque de considération me sidérait. Hey les crétins je ne sais pas dans quelle porcherie vous avez grandi, ni par quel plouc vous avez été élevé, mais la moindre des choses est de se lever et d’offrir son siège en présence d’une femme enceinte. Fixant le ciel je caressai subtilement mon badge tout en le laissant en place puis je les vis se lever. Désolé m’dame. Tels furent les propos, plus qu’édifiant, tenu par ces adolescents on ne peut plus écervelé. Je vous en prie, prenez place. Dis-je à l’égard de celle qui semblait être destinée à devenir mère d’ici quelques mois.

J’étais reconnu comme étant quelqu’un de sombre, de nature quasi asociale, et cette façon pour le moins particulière que j’avais eu de gérer cette horde de voyous en devenir ne pouvait que tendre à alimenter cette opinion fort peu flatteuse qui se répandait à mon sujet. Et vous savez quoi ? Je m’en foutais totalement après tout j’étais loin d’accorder la moindre importance à ce que les gens pouvaient penser de moi. Depuis la mort de Rachel je n’étais plus l’ombre de l’homme que j’étais jadis et d’une certaine façon j’en étais venu à afficher cette attitude abrasive qui tendait à me coller à la peau.

Les regardant fuir au loin je portai de nouveau mon regard en direction de la magnifique jeune femme lui adressant même un léger sourire lorsqu’elle me remercia pour mon geste. Mais de rien, c’était la moindre des choses après tout. La regardant prendre place je m’apprêtais à la laisser lorsqu’elle me fit une proposition à laquelle je ne m’attendais aucunement. Vous savez je n’ai rien fait d’exceptionnel mais votre proposition est très gentille et c’est avec plaisir que je l’accepte. Je n’avais pas l’habitude d’autant de gentillesse et je dois admettre que je ne me reconnaissais plus dans ce genre de situation. Moi qui avait l’habitude de me comporter en dur, qui avait fini par s’habituer aux coups fourrés et se faire tirer dessus plus souvent qu’à son tour je dois admettre que le sourire empreint de douceur de la charmante demoiselle ne me laissait guère indifférent.